En janvier 2025, l’École de l’intelligence artificielle en santé (ÉIAS) du Centre hospitalier de l’Université de Montréal (CHUM) a franchi un jalon majeur avec le lancement du tout premier diplôme interuniversitaire (DIU) au monde consacré à l’intelligence artificielle (IA) générative appliquée à la santé.
Un diplôme né d’une collaboration franco-québécoise
Codéveloppé avec les universités de Bourgogne Europe, de Caen Normandie, de Paris Cité, et de Nantes, ce programme en ligne de 80 heures forme une cohorte de 25 membres à l’utilisation responsable, éthique et sécuritaire des modèles d’IA générative en contexte clinique. L’objectif est de transmettre les connaissances théoriques et pratiques nécessaires pour concevoir et intégrer des solutions innovantes dans la pratique professionnelle en santé, tout en favorisant un usage critique et réfléchi de ces technologies émergentes.
Le projet a bénéficié du soutien offert par le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) et le ministère des Relations internationales et de la Francophonie (MRIF), ce qui a permis d’assurer sa diffusion et sa reconnaissance tant au Québec qu’en France.
Initié par Patrick Callier, professeur à l’Université Bourgogne Europe—Centre hospitalier universitaire (CHU) Dijon Bourgogne, et coordonné par un comité regroupant le CHUM et plusieurs établissements français, le programme de ce DIU est offert par une trentaine d’experts internationaux en IA. Parmi eux figure le Dr Louis-Antoine Mullie, intensiviste au CHUM et leader en IA générative en santé, qui est responsable du module sur les modèles transformateurs du langage naturel en santé, tels que ChatGPT et BERT.
Une approche pédagogique innovante et collaborative
Le parcours de ce DIU se distingue par une approche pédagogique à la fois rigoureuse et innovante. Entièrement offert en ligne, il se déroule sur une année universitaire à raison d’un module toutes les deux semaines. La formation alterne entre les exposés théoriques, les études de cas, les mises en situation et les activités collaboratives. Les six modules abordent successivement les fondements de l’IA générative en santé, les modèles et outils émergents, les applications cliniques concrètes, ainsi que les enjeux éthiques, juridiques et réglementaires liés à son utilisation. Chaque module est conçu pour permettre aux apprenantes et apprenants d’acquérir une vision complète de l’intégration de ces technologies dans la pratique clinique, tout en développant un esprit critique envers les algorithmes et leur fonctionnement.
Dans cette même logique, l’enseignement repose sur des méthodes d’apprentissage actives, où la collaboration interdisciplinaire joue un rôle central. Les cohortes réunissent des personnes issues des soins, de la recherche et des technologies, favorisant ainsi des échanges riches et ancrés dans la réalité de différents milieux. Ledit DIU a suscité un engouement auprès de l’écosystème québécois en IA[1], avec l’inscription de deux personnes au Québec.
Au-delà des cours magistraux, le programme comprend une importante composante pratique : le Datathon IA4Care, organisé en avril 2025. Cet évènement intensif a permis à neuf équipes multidisciplinaires de relever des défis concrets liés aux soins, tels que le développement d’outils d’aide au diagnostic, la personnalisation des traitements, la création de solutions pédagogiques ou le développement d’outils destinés à la patientèle.
En mai, les étudiantes et étudiants ont présenté leurs projets au CHU Dijon Bourgogne lors d’une journée d’évaluation, mettant en valeur la pertinence des solutions créées et la diversité des profils mobilisés. Ces activités immersives favorisent le transfert des connaissances et la transformation concrète des pratiques cliniques, tout en stimulant la créativité et l’innovation des personnes participantes.
Un partage d’expertise au bénéfice des soins
Fruit d’un partenariat franco-québécois d’envergure, ce DIU illustre le rôle catalyseur de l’ÉIAS dans le partage d’expertise en IA de la santé sur la scène internationale.
« Notre collaboration avec le Pr Patrick Callier et le CHU Dijon Bourgogne remonte à 2022. Si elle était censée se limiter à un partage de connaissances entre acteurs clés de l’IA en santé, elle a donné lieu à des retombées beaucoup plus importantes que celles anticipées, dont ce premier DIU en IA générative en santé »[2], rappelle Dany Girard, conseillère en financement et partenariats à l’ÉIAS. Elle souligne également « la détermination et le grand travail de collaboration de l’équipe de l’ÉIAS », tout en rappelant les liens solidement tissés entre le CHUM et des acteurs majeurs du réseau de santé français.
Ce programme s’inscrit dans un écosystème de collaborations structurantes, notamment le cycle de conférences transatlantiques Regards croisés, mené avec NumIA Santé et l’Institute for Smarthealth (INeS), et soutenu par la Commission permanente de coopération franco-québécoise. Lancé lors de la 1re Journée de l’IA générative en santé, à Beaune, en mai dernier, il a permis à l’ÉIAS d’animer plusieurs conférences et ateliers à Beaune, à Nantes et à Paris, tandis que des expertes et experts de la France sont venus au CHUM : l’illustration d’un échange bilatéral riche sur les innovations et les bonnes pratiques en formation et soins. Ces activités témoignent du rayonnement international du CHUM et de l’engagement de l’ÉIAS à créer des ponts durables entre la recherche, la formation et la pratique clinique. La plus récente conférence Regards croisés a eu lieu le 29 octobre, à Montréal, en partenariat avec MTL connecte, et le Printemps numérique.
Une redéfinition des pratiques cliniques de demain
Les professionnels de la santé intègrent déjà l’IA dans leur pratique, et le DIU répond à cet essor des technologies dans les hôpitaux d’ici comme d’ailleurs, tout en répondant à plusieurs enjeux en santé.
« L’IA générative en santé va nous aider à transformer nos façons de soigner pour faire face aux défis en santé que sont les besoins grandissants et le vieillissement de la population, en plus de la pénurie de la main-d’œuvre »[3], souligne Dany Girard.
En développant les compétences nécessaires pour comprendre et utiliser ces technologies, ce DIU contribue à l’optimisation des pratiques, à l’amélioration continue des parcours et à la pertinence des soins offerts à la population. Il constitue un modèle exemplaire de coopération académique et institutionnelle, où l’expertise scientifique, le sens clinique et la vision éthique préparent les futurs professionnels… sans jamais perdre de vue l’essentiel : l’humain au cœur de la santé.

De gauche à droite : Gaëlle Hermans, conseillère pédagogique à la DEAC ; Dany Girard, conseillère en financement et partenariats, à la DEAC ; Patrick Callier, chef de service du Laboratoire de génétique chromosomique et moléculaire du CHU Dijon Bourgogne ; Natalie Mayerhofer, adjointe de direction à la DEAC ; Barbara Mathian, directrice des enseignements numériques de l’Institute for Smarthealth ; et Nathalie Beaulieu, présidente-directrice générale adjointe du CHUM.
[1] Bouitcha, A. (2025). Un premier diplôme pour former les soignants à l’IA générative en santé.
[2] CHUM. (2025). Un premier diplôme en IA générative en santé voit le jour !
[3] Ibid.